IL EN A REVE, IL EN A MANGE , IL Y EST ALLE ET IL L’A FAIT….JUSTE ENORME Mr PETER Arnaud
Je vous laisse vous régaler avec son compte rendu
Un rêve d’aventure…
Samedi 5 aout 2016, 1h30 du mat, le réveil sonne, c’est l’heure ! La voiture, qui va servir de stand de ravitaillement tout au long des 180 km de vélo et des 37,5 premiers kilomètres de CAP (le reste, c’est du trail) est déjà chargée depuis la veille. Petit déj enfilé tranquillement mais pas trop, un bol de riz, un bol de thé et une part de gâteau… Je suis toujours aussi causant, tout entier concentré et tendu comme un arc, pauvre Thierry, qui a quand même pu s’éclater les jours précédents en faisant deux randos dont la plus célèbre de Norvège, celle de Trolltunga. Le stress monte un peu quand la voiture d’un des concurrents, un polonais, logé dans la même auberge de jeunesse que nous (en fait, une pension de jeunes filles toute l’année scolaire reconvertie le temps des vacances en hôtel), ne veut plus démarrer… Pas de pinces croco et avec nos voitures chargées jusqu’à la gueule, impossible de les emmener… Finalement, ce sera taxi pour eux (et un t shirt noir pour celui qui aura eu une belle frayeur)… Arrivé à Eidfjord (le départ du ferry, l’arrivée nat et la T1), je procède comme d’habitude, sans précipitation… Thierry, fort de son expérience sur ses multiples ironman(s), a su me mettre en confiance les jours précédents… « Ce n’est qu’un triathlon, Arnaud, tu es là pour vivre une expérience, pas pour la qualif… »… « Ne te pose pas de questions… Tu es prêt ! ». Et c’est tellement vrai. Toute l’année, j’ai mangé… des heures et des heures d’entrainement, jusqu’à l’overdose, venue juste avant notre départ pour la Norvège… Des moments parfois difficiles mentalement à cause de l’accumulation, de la fatigue et des conditions météo… Juste pas envie par exemple de sortir courir 1h30 à 2h non-stop en maintenant du 14 km/h un lundi soir du mois de mars en rentrant du boulot alors que dehors, c’était brumeux et froid… Et ce retour de l’Elsassman, le 10 juillet précédent… en vélo depuis Ensisheim jusqu’à Souffel, seul, par 36 degrés à l’ombre, en maudissant mon coach et ami Christophe Terzi (mon entraineur de mes premières années de triathlon à Rouen, en Normandie, 11 fois finisher sur ironman et trois fois qualifié pour Hawaii en 2008, 2009 et 2012), un mec simple, toujours à l’écoute, bienveillant et positif, mais qui me chargeait régulièrement après les courses, comme ce soir là où je devais enchainer trois heures de vélo après la course (finalement, ça a été un peu plus !) et où je suis rentré chez moi vers 22 h…
Je ne prends pas encore conscience que je suis dedans, que je vis cette course mythique qui me fait rêver depuis des années déjà… La concentration, encore… la même que celle qui me faisait monter dans des avions … et en sauter, sans réfléchir, juste en me concentrant sur ce que je devais faire… il y a longtemps, en école de parachutisme (47 petits sauts à mon actif, entre 2500 et 4000 mètres, bien peu par rapport aux milliers des moniteurs chevronnés). Il est 3 heures, il fait encore nuit, mais les lampadaires et les frontales des concurrents et de l’organisation éclairent tant bien que mal ce parc à vélos tout simple dans lequel je m’applique à déposer mon petit vélo bien chétif par rapport aux super vélos de chrono équipés de Zipp. La veille, compte tenu des conditions météo prévues, j’ai préféré retirer mes cosmic 40 et les remplacer par des ksyrium pro exalith… Et je vais bientôt me rendre compte que c’était le bon choix ! Pas envie de traîner… 3h20, l’embarquement sur le ferry est autorisé… Une photo souvenir avant de monter et hop… J’ai enfilé, comme la plupart des concurrents, ma combi jusqu’à la taille, juste revêtu d’un t shirt, celui du triathlon de la wantz de 2015 et de mon bonnet fétiche arborant fièrement un pompon bleu blanc rouge ! Il ne fait pas froid, une quinzaine de degrés, ou alors c’est le stress qui me maintient à bonne température. Je foule le pont du ferry, celui que l’on peut voir sur toutes les vidéos du Norseman, celui où dans une heure à peu près je vais redescendre (car nous devons tous monter à l’étage passagers pour faire la « traversée ) pour prendre une bonne douche d’eau de mer en sorte d’amuse-gueule… Quelques rencontres comme celle de Xavier, un bordelais qui connait Mathias (notre Mathias, Mathias Schott, parti cette année du club pour revenir dans son pays)… Ambiance sympathique mais tendue… Une file interminable de triathlètes devant les seules et uniques toilettes du ferry ! Et c’est l’heure ! Tous en bas, sur le pont. Il fait toujours nuit… Première « douche », puis une deuxième, un petit échauffement musculaire en faisant tourner les bras… De plus en plus de monde sur le pont… J’ai dû descendre dans les premiers… Concentré, toujours, je me place dans les deux trois rangées de concurrents qui attendent le « jump ». L’eau de la « douche » ne m’a pas paru froide et je suis confiant. L’organisation nous a indiqué la veille que la température de l’eau était de 13 à 14 degrés selon les endroits. C’est beaucoup par rapport à mon entrainement Nat le plus terrible de l’année, trois jours consécutifs en Normandie en décembre, trois « baignades » de 25, 35 puis 45 minutes dans une eau entre 10 et 11 degrés… Finalement, à la Toussaint 2015, la Manche était chaude (trois séances par 14-15 degrés) et début juillet ses 16 degrés me paraissaient une fournaise, à tel point que je me vois encore dézipper le dos de ma combi pour avoir un peu de frais ! Venez nager avec moi dans la Manche en décembre et vous comprendrez que 13-14, c’est tiède ! J’avais voulu essayer 8 degrés en février, mais Christophe, une vraie mère-poule, me l’a formellement interdit ! Nous sommes autorisés à sauter, les uns après les autres, méthodiquement et sous l’œil des membres de l’organisation pour éviter tout accident… Et c’est le grand saut dans le noir… A peine revenu à la surface, je cherche du regard le lieu supposé du départ, un peu difficile car il fait vraiment nuit. Finalement, les frontales des kayakistes apparaissent un peu plus loin formant une ligne à 500 mètres du ferry. J’y vais sans me précipiter en m’appliquant sur mes gestes et en suivant les conseils lus sur internet, s’échauffer le plus possible la tête hors de l’eau, ne pas sprinter, laisser le corps et le cœur s’habituer à l’environnement. Mes bouchons et le bonnet néoprène me maintiennent de toute manière la tête au chaud… Pas de sensation de froid, les entrainements ont payé… Je me place et vais attendre quelques dix minutes sur la ligne de départ. La plupart des concurrents ont fait le choix de se placer le plus près possible du bord du fjord… pas moi… Avec quelques autres, nous nous sommes mis à l’extrémité gauche de la ligne, des places royales, mais mieux vaut ne pas avoir peur du « large ». 5 h et des poussières, le départ est donné, je m’applique dans ma nage en essayant de ne pas m’écarter de mon axe, et c’est un peu difficile car on ne voit … Rien ! Il fait toujours nuit et les seuls repères visuels sont les canoés et les autres concurrents (Eidfjord n’est pas encore visible car le départ se trouve « derrière » une courbe rocheuse)… 4 km, c’est long ! La nuit devient de plus en plus claire… Les lumières d’Eidfjord sont visibles dans le lointain mais la température de l’eau diminue à mesure que l’on se rapproche de l’arrivée. L’organisation nous a prévenu qu’il y avait un courant défavorable… On le sent bien ainsi que les vagues ! Des vagues dans un fjord ! Le vent qui se déchaine depuis la veille transforme cette étendue limpide d’il y a deux jours encore en mer démontée !!! Le meilleur temps natation de la course sera de 59’58’’ !!!!! Et le vainqueur n’aura parcouru ces 4 petits kilomètres qu’en 1h06’11’’ !!!! Les dernières centaines de mètres sont un peu douloureuses avec une crampe qui me saisit dans un mollet, mais, miracle, en essayant de me détendre au maximum tout en nageant, je limite les dégâts et ma sortie de l’eau se passe sans encombre. Les bras bienfaiteurs des membres de l’organisation nous propulsent… Je cours, enlève bonnet et lunettes, dézippe déjà la combi et retrouve Thierry qui va se révéler tout au long de la journée un accompagnateur-assistant-ravitailleur hors pair, un coach, un directeur technique digne de ceux du tour de France, toujours attentif, prévenant, encourageant, boostant… Je ne trouve pas de mots assez forts pour dire à quel point il s’est donné à 100 % et même au-delà. Merci Thierry, merci encore ! Vous auriez dû croiser son regard à l’instant où, encore un peu sonné par la nat, il m’arrache littéralement la combi, les bras puis les jambes, me frictionne (à ma demande) les mollets avec de l’huile de Foucaud, me tend les affaires de vélo les unes après les autres, prenant le soin de « checker » avec moi si tout est ok, si j’ai tout ce qu’il me faut… Faut dire que dans le parc à vélo (sur cette course c’est autorisé), ça a été déshabillage intégral ! A poil ! Je n’en reviens pas du temps affiché lors de ma sortie du parc, 1h25 !!!! J’ai l’impression de ne pas être très bien classé, et pourtant, il reste encore un sacré paquet de vélos ! Je verrai plus tard qu’en fait je suis sorti 58e du parc !
Il fait doux mais comme la pluie est prévue et qu’au sommet du fjord, la température annoncée la veille est de 4 degrés (finalement 5), j’ai préféré enfiler des jambières imperméables sous mon cuissard été, un t shirt technique et un k way, pour l’instant grand ouvert. L’ascension du fjord, qui équivaut à celle du grand ballon, se passe très bien … Particularité de la course, nous traversons plusieurs tunnels (l’éclairage avant et le gilet jaune sont obligatoires). Je remonte quelques concurrents dont Lucas Semblat, un jeune autrefois au club, très sympa. Le sommet se profile peu à peu. Thierry m’y attend mais je n’ai aucune envie de m’arrêter et on se donne rdv plus loin, à Dyranut, qui marque le début d’une longue portion plate ou légèrement descendante au milieu d’un paysage de steppe, de lacs par milliers et de glaciers. Je remets enfin la plaque, ça tourne à toute berzingue avant quelques rampes à 8% où je suis encore à l’aise (les « trois ballons » et « l’Alsacienne » ont payé). Le paysage, je l’ai vu l’avant-veille de course, mais là, ça va pas être possible ! Le brouillard apparait, on ne voit rien à plus de 200 mètres, et un vent à décorner les bœufs souffle, pour l’instant dans le dos, une aubaine ! Et ça caille, vraiment ! Dyranut, fini le k way, j’enfile la thermique comme prévu avec Thierry le jour de la reco… Bon choix. D’autres concurrents ne le font pas et je vais les voir plus haut s’arrêter comme des mouches pour se changer, frigorifiés… Je parcours des kilomètres d’une belle route sinueuse où le 52.12 passe très bien, même dans le brouillard. « Norseman is an experience, not a competition » disait la veille Dag Oliver, le gentil bûcheron organisateur avec lequel je ne sais pas encore que je vais fièrement poser en t shirt noir. Oui, c’est vrai, mais dans l’instant, je fonce et je ne pense qu’à une seule chose, le t shirt ! Le brouillard disparait peu à peu et j’ai de plus en plus confiance… mais la pluie commence à tomber, de plus en plus drue, des hallebardes ou des chiens et des chats comme disent nos voisins grand bretons, un déluge !!! La route devient glissante et le vent, toujours aussi fort, souffle désormais de travers souvent défavorable. Thierry me dira après la course avoir vu les concurrents équipés de vélos de chrono avec jantes hautes faire des écarts hallucinants ! J’avale les kilomètres sans sourciller en prenant soin de prendre (arracher avec les dents serait plus juste) une fois de temps en temps un morceau de sandwich (pain de mie, boursin local et jambon) ainsi qu’un gel et une rasade de Périer dégazéifié (me suis entrainé toute l’année à ce régime là). La pluie battante devient usante vers le km 100 et la sensation de froid dans la première décente vers Geylo me crispe. Mais Thierry est là, toujours prévenant et attentif. Je prends le temps d’avaler quelques gorgées de coca, de mordre dans un nouveau sandwich que j’embarque et de refaire le plein de gels, et ça repart. Thierry écrira que je grimace un peu, et c’est vrai… petit passage dans le dur que le coca et les cols vont me faire oublier. Un col, c’est dur, c’est long, mais dans des conditions climatiques pareilles, ça réchauffe ! Mon vélo avec ses roues légères est taillé pour ça, et rien ne pourra être plus dur que ce p… de petit ballon et l’enchainement avec le platzerwasel de la cyclo « l’Alsacienne ». Le mental reprend le dessus. Je dépose ceux qui m’avaient doublé sur leurs vélos de chrono. Après le quatrième col et ses rampes à 10%, je sens venir la délivrance, le kilomètre 150 ou 152. J’ai le parcours ancré en tête, et je sais qu’ensuite ce sera près de 30 kilomètres de descente dans des virages dangereux et sur une route défoncée d’abord puis sur de longues portions droites mêlant replats et descentes. Dernier ravito avec Thierry vers ce km 152. Je lis la confiance dans ses yeux et lui doit sentir la détermination dans les miens… Je trace… Jamais senti aussi seul, plus de concurrents à part une triathlète en rose et un américain un peu frileux dans la descente… Je prends des risques sur cette route détrempée en lâchant complètement les freins et en appuyant sur les replats… Seul… A tel point qu’à un moment je vais me demander si je n’ai pas loupé un embranchement…
Le paysage a changé. La forêt est de plus en plus dense, les derniers 10 kilomètres sont interminables. La pancarte 180 apparait mais pas le parc ! Encore deux trois kilomètres et c’est gagné pour la partie vélo… Petit parc où Thierry m’attend avec toute sa bienveillance et son efficacité redoutables. Il ne fait plus 5 degrés mais 15 et la pluie semble se calmer… On se met de nouveau d’accord pour les ravito, tous les trois kilomètres, et je repars, les jambes légères. En sortant du parc, je découvre enfin mon classement provisoire sur un très grand bloc note à spirales tendu par les bénévoles avec le chiffre… 65. Ca sent bon ! Les entrainements de mon Terzouille, c’est comme ça que j’ai toujours appelé Christophe (Terzi), ont vraiment payé ! Petite erreur, partir avec des bidons à la ceinture… Ils me défoncent le bas du dos à chaque mouvement… Je les refile à Thierry au bout de trois kilomètres, inutiles. Ils m’ont cependant permis de ne pas aller trop vite à la transition… Et de faire ma pause vidange ! Je me suis retenu de faire une pause pipi sur toute la fin du parcours vélo mais là, ça urge et cette vidange va me paraitre interminable. Cinq concurrents me dépassent à cette occasion. Objectif, km 25 et le début de « Zombie Hill » ainsi dénommée par les anciens finishers au t shirt noir car… Ca va monter ! Avec Thierry, tout est bien réglé, une petite gorgée de coca, un peu d’eau et sur la fin, un morceau de banane tous les 3 kilomètres que je digère très bien… Vers le km 20, le Mont Gaustatoppen apparait enfin en fond de vallée, un monstre dressé comme un volcan, pas loin de 2000 m de haut (1883 exactement) alors que les 25 premiers kilomètres de CAP se déroulent aux alentours de 300 m d’altitude. Il se dresse devant vous en vous narguant et en vous rappelant à la réalité : c’est la haut que le t shirt noir se mérite, la course est loin d’être finie ! J’ai maintenu jusqu’à présent un rythme régulier à 12 km/h environ, mais là ça ne va plus être possible… Courir sur des rampes entre 8 et 12 %, ça se fait, n’importe quel coureur qui n’a jamais fait de triathlon et encore moins une distance pareille vous le dira, mais là, non… Je vais essayer mais en me rendant à l’évidence que si je veux arriver au sommet, il faut gérer et … marcher, marcher vite mais marcher, déterminé à atteindre la barrière, celle du 32eme kilomètre et encore celle du km 37,5. Thierry lui y arrive, espèce de racaille ! Je le vois venir vers moi en courant, me filer de quoi manger et boire, repartir… en courant sur ces mêmes rampes ! Je viens de passer la pancarte « 30 » depuis quelques temps. Je suis seul. Thierry est parti garer la voiture au parking du 32e (au-delà c’est interdit par le règlement de course). Entre temps, j’ai échangé avec lui mes running ultra légères pour mes chaussures de trail. Au détour d’un virage, je vois l’extrémité de la pancarte routière indiquant ce fameux parking… Je n’y suis pas encore mais je me mets à pleurer en essayant tant bien que mal de retenir mes larmes. Ca y est ! Tu l’as fait ! La course n’est pas finie mais tu y es à cette fameuse barrière, celle dont tu parles depuis le début de cette préparation titanesque, celle qu’on peut voir dans ce reportage d’Intérieur sport sur Canal +, reportage devenu mythique chez les triathlètes, celle où le t shirt se joue, noir pour les 160 premiers ( mais dans un temps limite de 14h30), blanc pour les suivants qui vont terminer la course au lieu-dit Gaustablikk, sur une sorte de plateau. Ca y est. Les bénévoles présents sur place me félicitent et m’encouragent comme tous les Norvégiens que nous avons pu croiser du début à la fin de la course aux cris presque sioux de « Aya aya aya… ». A y est ! Thierry ne me quitte plus désormais, chacun avec un sac à dos contenant des effets obligatoires (vêtements chauds et imperméables, gants, bonnet, couverture de survie, lampe frontale, un litre d’eau chacun et de quoi manger…). Sur le seul replat de cette portion de parcours, je me mets à recourir doucement, sous les encouragements, les conseils de Thierry. Nous doublons ainsi quelques concurrents (d’autres nous doublent aussi). Dernière barrière, km 37,5… Une grande arche digne des lignes d’arrivée auxquelles sous sommes habituées, une vrai barrière, matérielle, avec vérification intégrale du sac et de ce qu’il doit contenir. Cette barrière est aussi horaire (aucun concurrent ne peut la franchir au-delà de 15h30 de course). Maintenant la partie trail commence… Gentiment d’abord, un mélange de terre et de caillasse qui devient rapidement du 100% caillasse, des éboulis à n’en plus finir. Ce Mont Gaustatoppen me rappelle certaines portions du GR 20 en Corse (trois à mon actif)… mais dans la brume et le froid. Le vent nous fouette et nous déstabilise parfois. Thierry galope comme un bouquetin et je me mets dans le rythme, un rythme de marche ascensionnelle rapide, cherchant sans arrêt où poser le pied sans se tordre la cheville… Toujours ces encouragements des randonneurs norvégiens ou de « support crews » redescendant dans la vallée.. « Aya, aya, aya »… Le sommet, bien qu’embrumé, se profile à travers l’écho des encouragements et des félicitations des bénévoles accueillant les finishers à l’arrivée… Et les marches, les marches pour moi mythiques, apparaissent enfin ainsi que la petite cahute de l’arrivée… Derrière moi, un autre concurrent arrive et me talonne (Thierry me dira ensuite qu’il ne s’agissait que de son accompagnateur). Hors de question de me faire gratter avant la ligne… Je monte ces dernières marches à pas de géants en oubliant presque Thierry qui filme en même temps et finit par lancer « mais c’est qu’il monte vite ce con ! », après m’avoir vu me remettre à courir et semer ce concurrent indélicat pour fouler enfin ce tapis noir et entendre à mon tour les applaudissements des bénévoles. La soupe chaude qu’ils servent est la bienvenue sur ce sommet où le thermomètre ne dépasse pas 3-4 degrés.
Je l’ai fait, mais je n’en suis pas pleinement conscient… 63e au scratch en 13h59’28’’ (66e sur le classement des hommes en t shirt noir) sur les 250 concurrents du départ. C’était un rêve, un rêve d’aventure, comme d’autres dans ma vie, celui de devenir officier dans l’armée de terre il y a longtemps, celui de faire de la chute libre, et plus tard de faire du triathlon. La Norvège est un beau pays que nous avons découvert avec Thierry, un peu pluvieux, mais beau… Des paysages magnifiques, des fjords déchiquetés par lesquels nous sommes arrivés jusqu’à des étendues de steppe aux pieds de langues de glace imposantes… Dépaysement garanti, quand en pleine épreuve vélo, vous croisez des Norvégiens en sens contraire faisant du skating (du ski de fonds sur roulettes) sur la route ! Nous verrons avec Thierry les derniers concurrents terminer leurs 42 km de CAP juste avant minuit en 18h53’ et mériter eux aussi leur fameux t shirt, blanc peut-être, mais un t shirt de Norseman quand même, méritant autant les félicitations que les premiers pour avoir été jusqu’au bout de cette épreuve dantesque à tous les niveaux, distance, dénivelé, conditions climatiques. Je ne remercierais jamais assez Thierry de m’avoir épaulé de cette manière lors de cette course. Merci à tous ceux qui m’ont adressé un petit mot d’encouragement avant la course et plus encore après, car c’est en vous lisant que j’ai commencé à prendre un peu la mesure de ce que j’avais réalisé… Merci…. Et à bientôt… Pour de nouvelles aventures !
Arnaud